Une équipe de chercheurs chinois[1] a publié hier dans la revue Cell Stem Cell une étude déjà largement commentée : « Ils ont, chez la souris, mis au point une technique permettant à partir de simples cellules souches de créer des pré-spermatozoïdes ayant toutes les caractéristiques fécondantes de spermatozoïdes naturels ».
Jiahao Sha, coauteur de l’étude explique que « reproduire des cellules germinales in vitro demeure le principal objectif de la biologie et de la médecine de la reproduction ». L’une des principales causes de l’infertilité masculine est en effet « l’incapacité à créer des spermatozoïdes dans les testicules ». Mais « la fabrication de sperme dans les testicules est l’un des processus les plus longs et les plus complexes de ceux qui se produisent dans le corps ». Avec ces résultats, les chercheurs déclarent « approcher du but humain ». Ils ont annoncé tester prochainement leurs travaux sur d’autres animaux, « avec l’objectif de commencer ensuite des études chez les humains ». Perspective qui soulève cependant « d’innombrables questions éthiques ».
Plusieurs équipes de recherche « ont déjà fait part de la création réussie de cellules germinales à partir de cellules souches mais sans pleinement en évaluer la viabilité ou démontrer que toutes les phases clé de la méiose s’étaient bien produites » (cf. Spermatozoïdes humains créés in vitro : Dans l’attente de réactions ? , Vers une nouvelle technique pour lutter contre l’infertilité masculine ?)
A partir de cellules souches embryonnaires, « les chercheurs ne sont pas allés stricto sensu jusqu’à l’obtention de spermatozoïdes véritablement matures ». Ils se sont arrêtés « à un stade précédent de la spermatogenèse, celui dit de spermatide ». Toutefois ces spermatides « ont permis, in vitro, de féconder des ovocytes ; puis les embryons ainsi obtenus se sont développés et des animaux ont été obtenus qui ont eux-mêmes pu avoir une descendance ».
Pour le journaliste et docteur en médecine Jean Yves Nau, il s’agit d’une « nouvelle étape vers des modifications génétiques transmissibles du patrimoine héréditaire de différentes espèces, dont l’humaine ». Les chercheurs chinois ont utilisé des cellules souches embryonnaires. Mais « rien n’interdit d’imaginer, à très court terme, l‘obtention de spermatides à partir de cellules de peau, prélevées chez un homme souffrant de stérilité par absence ou anomalies de spermatozoïdes. Et dans un tel contexte rien, techniquement, ne s’opposera bientôt plus à la modification du génome de ces néo-cellules sexuelles via la nouvelle technique, révolutionnaire, du CRISPR ».
[1] Dirirgée par Quan Zhou, Mei Wang, Yan Yuan, Qi Zhou (Department of Developmental Biology, School of BasicMedical Sciences, Southern Medical University Guangzhou).
AFP (25/02/2016) ; Jean Yves Nau (26/02/2016)