Dépistage prénatal de la trisomie 21 et médecine utilitariste

Publié le 28 Avr, 2011

Dans la revue Abstract Gynécologie, le Dr. Patrick Leblanc, coordonnateur du Comité pour sauver la Médecine Prénatale, revient sur les critiques lancées par des présidents de sociétés et collèges médicaux au sujet d’un amendement sur le diagnostic prénatal (DPN) voté en février 2011 par les députés. Dans une pétition, ceux-ci dénoncent le fait de proposer, dans le cadre du DPN, des examens de biologie médicale et d’imagerie "lorsque les conditions médicales le justifient". En quoi cela représenterait-il une menace pour le dépistage de la trisomie 21 et le libre choix des couples ? interroge le Dr. Leblanc (Cf. Synthèses de presse du 22/02/11, du  15/03/11 et du 09/12/10).

Parler de manque d’équité pour le choix des couples relève d’une présentation tronquée, explique le Dr Leblanc, qui relève chez les adhérents des sociétés médicales dont les présidents ont signé la pétition, une absence d’enquête préalable sur la pratique actuelle du DPN. Bien qu’aucune étape du DPN ne soit obligatoire, on constate que le dépistage, rendu systématique depuis un arrêté de juin 2009, s’est banalisé (Cf. Synthèse de presse du 03/07/09). Le ministre de la  santé a relativisé ce fait au Parlement en indiquant que le nombre d’interruptions médicales de grossesses (IMG) pour trisomie 21 constituait 10% des interruptions validées par les CPDPN. Tout comme les personnels médicaux qui ont signé une pétition contre l’amendement sur le DPN, Xavier Bertrand n’a pas parlé des risques du DPN ni de l’inégalité des femmes devant le risque de trisomie 21 selon leur âge. "La dimension éthique d’un dépistage s’évalue-telle exclusivement sur son efficacité ?" Des patientes témoignent, sur le site du Comité pour sauver la médecine prénatale, de l’incompréhension et de la détresse venues compliquer leurs grossesses qui auraient dû être vécues autrement.

En outre, souligne le Dr. Leblanc, la sémantique utilisée en matière de DPN est sous-estimée. L’expression selon laquelle des examens "sont proposés à toute femme..." revêt, en termes de droit, une valeur d’impératif. Formulé ainsi, le DPN se comprend donc comme une obligation, en contradiction avec l’article 16-4 du Code civil disposant que "toute pratique eugénique tendant à l’organisation et à la sélection des personnes est interdite". Le Dr. Leblanc rappelle que les tests précoces du sang maternel, qui sont actuellement développés, avec étude du génome foetal, vont accentuer encore ce problème de sélection dans le contexte du dépistage généralisé. Ainsi, le DPN de la trisomie 21 est "l’arbre qui cache la forêt". L’amendement critiqué permet, au contraire, de limiter les dérives et de renforcer les principes du Code de déontologie médicale que sont la liberté de prescription et le droit à l’information du patient adaptée à son état.

Enfin, peut-on réellement parler de "pression" du médecin sur la patiente lorsqu’il s’agit de privilégier le dialogue et de recueillir le consentement éclairé de celle-ci et de son conjoint – indispensable au dépistage –  après une information complète et loyale ? Le couple demeure toujours libre de décider une IMG si c’est son choix.

Abstract Gynécologie 04/11

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