[DECRYPTAGE] La fin de vie selon le Comité consultatif national d’éthique, dernier round ?

Publié le 23 Oct, 2014

C’est aujourd’hui que le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) rend son rapport sur la fin de vie. Il avait été annoncé par Jean-Claude Ameisen en décembre 2013 (cf. synthèse Gènéthique du 23 décembre 2013) pour sa sortie initialement prévue en février 2014. Il est présenté comme le rapport récapitulatif de l’ensemble du débat public sur la fin de vie amorcé en juillet 2012 et doit en principe être rendu pour évaluation à l’Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques (OPECST). Les défenseurs des états généraux, appelés par la loi de 2011, resteront sur leur fin et devront se contenter de cette « synthèse » qui sacralise l’autonomie du patient.

 

Quid des états généraux ? Ce rapport marque officiellement que les prises de position des différentes instances depuis 2012 font, a posteriori, office « d’états généraux »  exigés par la loi de 2011 (article L1412-1-1 du code de la santé publique). Ce rapport semble clore le débat participatif et il est à craindre que la suite de la réflexion annoncée par le CCNE se passe dans l’hémicycle.

 

Le CCNE semble désamorcer la question de l’euthanasie et du suicide assisté…

 Le « rapport du CCNE sur le débat public concernant la fin de vie » reprend donc les « points de divergences et de convergences » du débat de ces deux dernières années. Il note que les questions du suicide assisté et de l’euthanasie donnent encore lieu à un « profond clivage » dans la société française. Il invite sur ces deux questions à « approfondir la réflexion » afin d’avoir une « meilleure connaissance des situations limites dans lesquelles les malades ou leurs proches, ainsi que les professionnels de santé concernés estimeraient que ni les soins palliatifs ni une sédation ne suffisent à rendre acceptables les derniers instants de la vie d’une personne ».

 

… tout en faisant émerger de nouveaux « droits » sur la fin de vie

  • Rendre contraignantes les directives anticipées. Il faut rappeler qu’aujourd’hui le médecin est simplement tenu de « tenir compte » des directives du patient dans lesquelles celui-ci exprime ses souhaits quant à la limitation ou l’arrêt de traitements. Rendre contraignante ces directives opère un renversement de la relation médecin-patient, et vient réduire le médecin au rang de simple exécutant.
  • Créer un droit à la sédation profonde, lorsque la personne en phase terminale de fin de vie le demande. Ce « droit à la sédation profonde » aussi appelé « sédation terminale », est inquiétant. En effet, il faut rappeler qu’elle consiste non plus à soulager la douleur, mais endormir la conscience et hâter la mort. Il s’agit d’une « euthanasie par sédation » comme l’exprimait Pierre-Olivier Arduin ou encore d’une « euthanasie palliative ».  Ainsi, on peut voir ce droit à la sédation comme une porte ouverte au suicide assisté, puisque le patient pourrait alors exiger non plus d’être accompagné dans le soulagement de la douleur (comme le droit aux soins palliatifs par exemple), mais dans la perte de sa conscience, qui précipite sa mort. L’objectif n’est plus le traitement de la douleur mais la survenue de la mort.
  • Modifier la procédure médicale collégiale dans la décision d’arrêt de traitement « chez une personne qui n’est pas en fin de vie», pour un processus de décision collective incluant les proches. Cette préconisation fait référence au cas particulier de Vincent Lambert, pour lequel le CCNE acte que les traitements peuvent être arrêtés chez les personnes qui ne sont pas en fin de vie. Par là, le CCNE présente comme consensuelle une préconisation qui fait pourtant toujours l’objet d’un débat vif.
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Ce rapport intervient alors que les tractations politiques sont déjà largement engagées, à l’image des négociations entre Manuel Valls et le président du Parti radical de gauche (cf. synthèse Gènéthique du 21 octobre 2014).

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