De la recherche sur l’embryon (I/III)

Publié le 6 Mai, 2009

Dans Liberté Politique, Pierre-Olivier Arduin, responsable de la commission bioéthique du diocèse de Fréjus-Toulon, revient sur la question de la recherche sur l’embryon et sur le choix de la France en la matière.

Pierre-Olivier Arduin revient tout d’abord sur la découverte de l’existence des cellules souches embryonnaires humaines en 1998 par l’américain James Thomson.

En France, le première loi de bioéthique du 29 juillet 1994 stipulait que "toute expérimentation sur l’embryon est interdite".  Elle l’assortissait d’une peine de sept ans d’emprisonnement et de 700 000 francs d’amende. La loi du 6 août 2004 cèdera aux revendications des scientifiques, instaurant un régime dérogatoire d’autorisation. Le décret réglementant cette recherche est paru le 6 février 2006.

Or dans les faits, ce décret instaure une double rupture conceptuelle. Théoriquement, une période de cinq année est requise pour qu’un couple puisse confirmer l’abandon de tout "projet parental" sur ses embryons dits "surnuméraires". MAis, dans le même temps le décret du 6 février 2006 reconnaît que lorsqu’un couple met en œuvre une assistance médicale à la procréation (AMP), il peut lui être proposé "de consentir dans le même temps par écrit à ce que les embryons qui ne seraient pas susceptibles d’être transférés ou conservés fassent l’objet d’une recherche". Pour Pierre-Olivier Arduin, nous ne sommes donc plus très éloignés de l’intention de créer des embryons in vitro à des fins de recherche, strictement condamnée par le droit français.

L’autre rupture se greffe sur la pratique du diagnostic préimplantatoire (DPI). Le décret autorise en effet le couple à  donner son accord afin que les embryons porteurs d’une anomalie génétique soient donnés aux chercheurs qui en font la demande. Il autorise donc de manière détournée la création d’embryons malades in vitro à des fins de recherche.

En ce qui concerne la recherche sur l’embryon, Pierre-Olivier Arduin rappelle qu’aucun essai clinique n’a encore été réalisé chez l’homme et qu’il n’existe aucune perspective thérapeutique. Or, en 2008, l’Institut national de la santé américain comptabilisait 1 987 essais cliniques à partir de cellules souches adultes et 106 à partir de cellules de sang de cordon.

Rappelons que la FDA (Food and Drug Administration), l’Agence sanitaire américaine, vient d’autoriser la tenue du premier essai de phase I mené à partir de cellules souches embryonnaires humaines sur des personnes souffrant de lésions importantes de la moelle osseuse.(cf. Synthèse de presse du 26/01/09). Ces cellules souches embryonnaires ont pourtant fait la preuve d’une instabilité chromosomique à l’origine du développement de tumeurs.

Enfin, dernier point régulièrement dénoncé : expérimenter directement sur les embryons humains se fait au mépris de la déontologie la plus élémentaire qui conduit tout scientifique à travailler au préalable chez l’animal avant de faire des essais sur l’homme.

Utiliser ces cellules embryonnaires est d’autant plus "impardonnable", selon Pierre-Olivier Arduin, que les chercheurs ont découvert la potentialité des cellules souches adultes.  Ainsi en est-il de la découverte, en 2007 des cellules souches pluripotentes induites ou iPS (cf. Synthèse de presse 21/11/2007). Depuis, la technique ne cesse d’être perfectionnée. En Grande-Bretagne, certains chercheurs délaissent d’ailleurs la recherche embryonnaire pour se consacrer aux cellules iPS.

De plus, les chercheurs sont parvenus à cultiver des cellules iPS à partir de cellules de peau prélevées chez des personnes malades, ce qui a permis de produire des lignée cellulaires pour un très grand nombre de maladies. Cela réduit donc à néant la demande de l’Agence de la biomédecine à ce que soit poursuivie en France la recherche sur les embryons rejetés par DPI.

Les scientifiques ont aussi exploré avec succès d’autres sources de cellules souches adultes comme les cellules du sang de cordon.

Et Pierre-Olivier Arduin de conclure : "la prise en compte du respect de l’être humain dans sa phase embryonnaire permet tout à la fois de réconcilier la science et l’éthique et d’espérer que ces nouvelles voies riches de promesses s’avèrent fécondes".

Liberté Politique.com (Pierre-Olivier Arduin) 17/04/09

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