Claire Fourcade : depuis le mois de juin, « il n’y a pas eu un seul patient ni une seule famille qui m’ait demandé où en était ce projet de loi »

23 Jan, 2025

Dissocier l’euthanasie des soins palliatifs dans le projet de loi sur la fin de vie est « absolument essentiel » déclare le Dr Claire Fourcade, présidente de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP) dans un entretien pour Atlantico. « Garder les deux sujets dans le même texte freine le développement des soins palliatifs », affirme le médecin (cf. « Aide à mourir », soins palliatifs : François Bayrou veut deux textes de loi distincts).

La question des soins palliatifs fait l’objet d’un consensus dans l’ensemble de la classe politique et dans toute la société, là où l’euthanasie est un sujet « clivant ». Ainsi, séparer les deux sujets permettrait aux députés d’exprimer un avis différent.

La fin de vie : « un message collectif transmis par la loi »

Dans son livre « Journal de la fin de vie »[1], Claire Fourcade rappelle qu’accompagner des personnes en fin de vie, c’est leur « apporter quotidiennement un soutien, une présence, une humanité, et non pratiquer l’euthanasie ».

« La fin de vie, c’est bien plus qu’un simple acte médical : c’est un message collectif transmis par la loi », souligne la présidente de la SFAP. Ce message est actuellement : « Vous avez de la valeur, nous vous soutiendrons, nous ferons tout pour vous soulager et vous accompagner. Nous ne voulons pas précipiter votre mort ». Mais si l’euthanasie ou le suicide assisté sont légalisés, le message deviendra « Si vous souhaitez mourir, nous acceptons », alerte-t-elle. Dès lors, pour les personnes fragiles et vulnérables, légiférer sur l’euthanasie entraîne « un bouleversement profond aux conséquences majeures ».

Les soins palliatifs n’ont pas besoin d’une nouvelle loi

« Il est évident que dans le projet de loi discuté au printemps, les soins palliatifs ne sont qu’un alibi », observe Claire Fourcade. La présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, favorable à un texte unique, a d’ailleurs déclaré que « pour les soins palliatifs, on n’a pas besoin de loi ». « Elle a raison », affirme la présidente de la SFAP : « Des mesures réglementaires et budgétaires suffiraient largement ».

Quitte à vouloir traiter les deux sujets par une loi, « la logique impose de développer d’abord l’accès aux soins avant d’envisager l’accès à la mort ». Ce qui permettrait d’imposer les soins palliatifs comme une priorité.

L’euthanasie : « un combat de gens en bonne santé qui s’inquiètent de leur fin de vie »

« Ce qui est très frappant pour moi, c’est que depuis le mois de juin, où il y a eu la dissolution et l’arrêt des débats, il n’y a pas eu un seul patient ni une seule famille qui m’ait demandé où en était ce projet de loi », témoigne Claire Fourcade. La véritable inquiétude des patients concerne donc le soulagement de la douleur, l’accompagnement…

« Nous ne voyons absolument pas parmi nos patients, et je parle pour l’endroit où je travaille, mais également pour mes collègues et mes confrères avec qui je discute, une demande réelle des patients de légaliser la mort assistée », assure le médecin de soins palliatifs. « Je pense, au fond, que c’est un combat de gens en bonne santé qui s’inquiètent de leur fin de vie », commente-t-elle. La demande des patients se résume à vouloir vivre le plus longtemps possible, et « surtout » dans les meilleures conditions possibles.

 

[1] Editions Fayard

Source : Atlantico (23/01/2025)

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