Choisir le sexe de son futur bébé : une application de coaching fait polémique

Publié le 9 Jan, 2019

« Fille ou garçon, naturellement, c’est mon choix », clame l’entreprise MyBubelly, lancée en 2017. Elle propose à ses clientes une application de coaching facturée 149€ par mois pour choisir le sexe de leur futur enfant. Il faut compter 6 à 8 mois pour parvenir à son but explique Sandra Ifrah, fondatrice du concept, qui relativise : MyBuBelly « permet d’augmenter la probabilité d’avoir une fille ou un garçon », en deux étapes : « le suivi d’un régime alimentaire adapté 3 mois avant la conception, afin de modifier le pH vaginal de la femme et ainsi de favoriser le passage des spermatozoïdes porteurs des chromosomes X ou Y. Ensuite, il s’agit de bien suivre son cycle d’ovulation, le but étant de concevoir au moment le plus propice pour avoir une fille ou un garçon ». Pour ces deux étapes, les clientes sont coachées virtuellement et reçoivent une box mensuelle contenant des tests de pH et d’ovulation, des compléments alimentaires et un livret explicatif. « La nature nous donne des chances à 50/50, MyBuBelly peut faire pencher la balance à 40/60 ou 30/70 » précise Véronique Hamon, gynécologue et membre du conseil scientifique de l’entreprise.

 

Au terme de sa première année de commercialisation, et avec une moyenne de 100 à 150 nouveaux membres chaque mois, MyBuBelly publie un chiffre de 90% de réussite qui fait débat. « Tous les couples ont une chance sur deux d’avoir une fille ou un garçon. Les utilisatrices de cette application auront donc 50% de chance de voir leur souhait se réaliser. Mais ce ne sera pas lié à la méthode, simplement au hasard », estime Bernard Hédon, gynécologue obstétricien. L’entreprise se défend, rappelant qu’effectivement ce taux de réussite n’a pas été validé par une étude scientifique, mais qu’il s’agit d’un taux constaté par retour d’expérience.

 

D’autres détracteurs de MyBuBelly dénoncent des « bases scientifiques douteuses ». Qu’en est-il ? Il est connu que les spermatozoïdes porteurs du chromosome Y (qui donnent un garçon) se comportent différemment de ceux porteurs du chromosome X (qui donnent une fille). « Le chromosome X est plus lourd que le chromosome Y donc les spermatozoïdes qui portent un chromosome X sont plus lents, mais aussi plus résistants en milieu acide », explique Véronique Hamon. La méthode MyBuBelly vise donc à ajuster le pH vaginal à l’aide de mesures alimentaires dont les résultats n’ont pas été prouvés par une étude scientifique, et à choisir une date de conception plus ou moins proche de l’ovulation selon que la cliente désire une fille ou un garçon. Les études menées sur la méthode de régulation des naissances Billings[1], montrent qu’il est effectivement possible de favoriser la naissance d’un enfant du sexe désiré en ciblant la date de conception.

 

Si les bases scientifiques de MyBubelly ne relèvent pas des « remèdes de grand-mère », et s’il s’agit bien de créer les conditions pour que naisse un enfant du sexe désiré tout en restant prêt à accueillir l’enfant quel que soit son sexe, les problèmes éthiques posés n’en sont pas moins nombreux : est-il légitime de prédéterminer le sexe de son futur enfant ?

 

Diverses situations peuvent motiver les parents à choisir le sexe de leur futur enfant : la prévention de maladies liées au sexe, l’équilibre familial, le contrôle des naissances, qui sont des intentions acceptables si elles sont dénuées d’égoïsme. Il n’en est pas de même des intentions expérimentales ou idéologiques, ou encore de la pure et simple préférence des parents.

 

Si l’on peut trouver un aspect positif à cette application, c’est celui d’apprendre aux femmes à connaitre leur corps et leur cycle. Mais a-t-on vraiment besoin d’un tel business pour y parvenir ?

 


[1] La méthode d’auto-observation Billings se base sur le relevé de glaire et la sensation qu’elle donne au niveau des organes génitaux externes de la femme.

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