Alors que le débat sur la fin de vie est relancé en France, Mgr Jacques Suaudeau, membre de l’Académie pontificale pour la Vie, a accordé à Zenit un long entretien sur l’euthanasie.
Définition de l’euthanasie
Forgé au XVIIème siècle par Francis Bacon, le mot “euthanasie” trouve son origine dans les locutions grecques “eu” et “thanatos” qui désignent une “mort facile et douce”. Depuis, sa signification a évolué et, aujourd’hui, on pourrait définir l’euthanasie comme “l’acte de supprimer délibérément la vie d’un malade incurable pour mettre fin à ses souffrances ; ou bien encore pour éviter la prolongation d’une vie pénible ; ou encore pour mettre fin à une vie estimée non digne d’une personne humaine, et tout cela pour un motif de pitié“. Parallèlement, de nouvelles définitions apparaissent et troublent la réflexion. Ainsi parle-t-on d’euthanasie “active“, qui serait donner directement la mort, et d’euthanasie “passive“. Par euthanasie “passive”, certains entendent “laisser mourir” le patient selon l’évolution de sa maladie, sans le charger de traitements inutiles. Dans ce cas précis, l’euthanasie dite “passive” n’est pas euthanasie, puisque le non-acharnement thérapeutique n’est pas de l’euthanasie. Il convient donc de ne pas utiliser le mot “euthanasie” dans ce cas.
L’euthanasie, qu’elle soit directe (par injection) ou indirecte (par arrêt de l’alimentation), est toujours “active” et se définit par une volonté de donner la mort.
Il existe par ailleurs une myriade de termes euphémiques et techniques utilisés pour adoucir le terme d’euthanasie mais qui désignent en fait une même réalité violente ; citons l’”arrêt de nutrition par sonde”, l’”arrêt d’une alimentation – hydratation”, l’”analgésie en fin de vie”…
L’euthanasie dans l’histoire
Dans l’Antiquité païenne, cette pratique était généralement bien perçue car considérée comme une “mort digne”. Puis, avec l’avènement du christianisme, l’idée d’affronter sa mort avec dignité et confiance en l’Au-delà s’est répandue. Mais ensuite, cette conception a laissé place aux doutes et l’euthanasie a été portée au pinacle par le nazisme et son opération “Aktion T4 euthanasia” qui a fait environ 200 000 victimes.
Lobby pro-euthanasie
Après ce drame, le mouvement en faveur de l’euthanasie s’est tu, cédant la place au mouvement pour l’avortement, le temps que ces actes nazis soient oubliés. Ce lobby pro-euthanasie est un mouvement international, porté par des figures comme le Dr Jack Kevorkian aux Etats-Unis ou Philip Nitschke en Australie, et très organisé. Il a avancé par étapes, en introduisant de nouvelles sémantiques, du “meurtre par pitié” au “droit de mourir” en passant par le “mourir dans la dignité” et en utilisant un cas difficile pour généraliser (Vincent Humbert, en France).
La mort niée
L’euthanasie est aujourd’hui d’autant plus admise en Occident que notre rapport à la mort est bouleversé : on est passé de la mort intégrée et prise en charge à la mort cachée et déshumanisée. La douleur, la souffrance, la mort sont des réalités humaines que nos sociétés cherchent à nier ; en découle la tentation de fuir les derniers moments de la vie.
Les personnes en fin de vie ont besoin d’être accompagnées. Si les soins palliatifs accompagnent ces personnes, il ne faut pas pour autant que le reste de la société se désintéresse d’elles : l’assistance au mourant concerne tout le monde. L’accompagnement est d’autant plus nécessaire que les derniers instants de la vie sont importants pour vivre tout à fait sa mort. Et cela ne peut être que si la relation médecin-patient fondée sur la confiance réciproque n’est pas entamée par une possibilité euthanasique.