CCNE et recherche sur l’embryon : un avis tortueux

Publié le 2 Déc, 2010

L’avis 112 du Comité consultatif national d’éthique (CCNE), intitulé "Une réflexion éthique sur la recherche sur les cellules d’origine embryonnaire humaine, et la recherche sur l’embryon humain in vitro", a été rendu public mercredi 1er décembre 2010.

Pour la première fois, le CCNE n’a pas formulé de recommandations en termes d’interdiction ou d’autorisation mais il a souhaité fournir "des éléments de réflexion"». Alain Griemfeld, président du CCNE, a déclaré devant la presse : "on ne peut plus énoncer des recommandations oui/non dans les situations évolutives qui sont les nôtres. […] On n’est plus dans une situation axiomatique mais dans une situation de réflexion permanente parallèlement à l’évolution extrêmement grande des progrès des sciences de la vie et de la santé."

"L’idée est de faire avancer la réflexion et de laisser au législateur le soin de transformer en langage juridique l’objet de cette réflexion", a indiqué de son côté Jean-Claude Ameisen, l’un des rapporteurs de l’avis.

Ce dernier a également expliqué qu’ils estimaient que la recherche sur les cellules issues d’embryons détruits ou voués à la destruction et la recherche sur l’embryon vivant étaient deux questions différentes qui appelaient des traitements différents. L’avis suggère donc d’introduire une distinction entre deux régimes encadrant la recherche sur l’embryon : un régime d’autorisation sous condition pour les travaux sur les embryons surnuméraires dépourvus de projet parental et un régime d’interdiction avec dérogations pour les travaux sur des embryons créés visant à améliorer les techniques d’AMP.

Le CCNE s’est également saisi de la question des cellules iPS, estimant que s’il s’agissait aujourd’hui d’une alternative éthique à la recherche sur l’embryon, ce n’était pas pour autant une alternative scientifique. "Les deux recherches se complémentent", a affirmé Jean-Claude Ameisen avant d’évoquer d’éventuels problèmes éthiques sur les cellules iPS au motif qu’elles pourraient peut-être un jour être transformées en cellules embryonnaires.

11 des membres du CCNE ont tenu à émettre des réserves par rapport à l’avis, estimant que "le texte laisse ouvertes des questions dont nous pensons, en conscience, qu’elles ne peuvent rester ouvertes", a expliqué Xavier Lacroix. Ils ont notamment manifesté leur désaccord avec l’importance accordée à la notion de projet parental qui demeure un discriminant entre les embryons qui pourraient faire l’objet d’une recherche et ceux dont l’intégrité serait protégée : "le projet parental permet le lien humain, mais ce n’est pas ce lien qui fait que l’embryon existe" a affirmé Xavier Lacroix. Il a également rappelé qu’avec l’embryon, il y a "une vie humaine commencée indéniable", que la vie humaine est un continuum et que rien ne justifie d’établir des degrés de dignité entre la vie embryonnaire et la vie post-natale.

Les membres "réservés" regrettent aussi que l’avis ne réaffirme pas l’interdiction de principe de la recherche sur l’embryon : "Si l’interdit est rappelé, l’essentiel est sauf […] Les dérogations ne sont alors que conjoncturelles". Ils refusent enfin la création d’embryons pour la recherche et demandent la réduction, et à terme la suppression, de la création d’embryons surnuméraires. Xavier Lacroix a en effet dit craindre une "connivence" entre la libéralisation de la recherche et une augmentation du stock d’embryons surnuméraires.

En raison de ces réserves, la sénatrice Marie-Thérèse Hermange a refusé de signer l’avis.

Pour la Fondation Jérôme Lejeune, "ce document présente un galimatias amphigourique, révélateur d’un tumulte de la pensée servant des intérêts particuliers. Malgré l’absence de recommandations clairement exprimées, on devine facilement l’objectif principal qui est visé : en finir avec la loi actuelle. Il s’agit en fait de l’expression des intérêts catégoriels de certains chercheurs". "Faute d’être capable de rappeler que l’embryon humain est un membre de l’espèce humaine et que la loi qui le protège passe avant la loi qui le détruit, le Comité consultatif national d’éthique a perdu tout crédit. Son éthique aussi est devenue consultative".

Gènéthique 02/12/10

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