Alors que plus de 243 600 interruptions volontaires de grossesse ont été recensées en 2023 (cf. France : 243 623 avortements en 2023, un chiffre encore en hausse), l’année dernière l’Institut national d’études démographiques (Ined) a lancé « une grande enquête pour mieux cerner les motivations et les attentes des femmes » face à l’avortement.
Avant que les résultats ne soient disponibles à la fin de l’année, différentes pistes sont formulées. Outre « la facilitation continue de l’accès » (cf. Malgré un nombre record d’avortements en 2023, le Sénat s’inquiète d’un accès « fragile »), les « changements intervenus dans la pratique contraceptive » seraient en cause. « En une génération, on est passé de la pilule vécue comme une libération à la pilule considérée comme un fardeau », constate Joëlle Belaisch-Allart, présidente du Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) (cf. Contraception : les Françaises changent leurs pratiques ).
Cocher les critères du « bon parent »
Mais pour la sociologue Laurine Thizy, professeure de sciences économiques et sociales, « comme pour nombre de ses collègues », la « raison principale » expliquant le nombre d’avortements est la « norme procréative » qui « s’est imposée ces dernières décennies ».
« Avec la contraception et la légalisation de l’IVG, on est passé du modèle de maternité subie à celui de maternité choisie qui s’accompagne d’exigences fortes autour de l’accueil d’un enfant », analyse la sociologue. Dès lors, pour être un « bon parent », un ensemble de critères doivent être rassemblés : « âge, stabilité du couple, conditions matérielles, disponibilité par rapport à la vie professionnelle… » Et, s’ils ne sont pas réunis, « les femmes auront plus souvent recours à l’avortement face à une grossesse imprévue ».
« Le taux de recours augmente le plus dans les catégories d’âge 20-24 ans et 25-29 ans, sur qui pèsent cette norme procréative, relève Magali Mazuy, chercheuse à l’Ined. Les plus jeunes reculent l’entrée dans la parentalité, les plus âgés diffèrent l’arrivée d’un enfant supplémentaire. »
Mais, pour le moment, d’après la chercheuse, « toutes ces explications ne valent que comme hypothèses faute d’études pour les objectiver ».
Source : La Croix, Antoine d’Abbundo (17/01/2025)