Avis du CCNE N°90 : “Accès aux origines, anonymat et secret de la filiation”

Publié le 31 Jan, 2006

Dans un avis rendu public le 26 janvier 2006, le Comité consultatif national d’éthique (CCNE), qui s’était auto-saisi il y a quatre ans, livre ses réflexions et recommandations sur la question de l’anonymat, du secret de la filiation et de l’accès aux origines dans une société où la filiation biologique et la filiation sociale ou affective sont de plus en plus dissociées.

 

Dissociation croissante des filiations biologiques et sociales

 

Aujourd’hui, 5 à 7% des enfants, soit 40 000 à 58 000, naissent chaque année

dans des “conditions inhabituelles” (accouchement sous X, procréation médicalement assistée avec tiers donneur de gamètes ou don d’embryon, etc). S’affrontent ainsi de plus en plus souvent la question du secret relatif au mode de conception, l’anonymat du ou des parents biologiques et la demande d’accès aux origines. Le CCNE élargit par ailleurs sa réflexion pour aborder la maternité de substitution et l’accès à l’AMP (assistance médicale à la procréation) ou à l’adoption des personnes homosexuelles.

 

Levée du secret et maintien de l’anonymat

 

Le CCNE encourage la levée du secret  du mode de conception le plus tôt possible par les parents eux-mêmes et les invite à prendre conscience des “effets dévastateurs d’une révélation tardive du secret”». En revanche, la levée de l’anonymat n’est pas recommandée pour les donneurs de gamètes ou d’embryon, ( les gamètes ne sont pas des parents ), mais le CCNE est favorable à ce que l’enfant, une fois majeur,  puisse avoir accès à des informations “non identifiantes”. Dans le domaine de l’accouchement sous X, le CCNE voit un grand progrès dans la création du CNAOP (Centre National d’Accès aux Origines Personnelles) et encourage l’extension de ses compétences. En effet, depuis la loi du 22 janvier 2002, relative à l’accès aux origines des personnes adoptées et des pupilles de l’Etat, un enfant devenu majeur peut avoir accès s’il le demande, à des informations identifiantes sur son origine, après accord exprès de sa mère biologique si elle a laissé des renseignements sous enveloppe scellée.

 

Homoparentalité et maternité de substitution

 

Concernant la demande d’enfants par des couples homosexuels, “une question très actuelle mais peut-être excessive dans son importance”, les membres du Comité ne sont pas opposés à l’adoption. En revanche ils sont réticents quant au recours à l’AMP qui est limitée par la loi à une finalité médicale et au traitement de la stérilité d’un couple. Enfin, concernant les grossesses par procuration ou maternités de substitution, le CCNE continue à émettre de fortes réserves en raison du risque de “marchandisation” du corps et de confusion des maternités pour l’enfant.

 

Disponibilité des gamètes et  des embryons

 

Dans son Annexe I à l’avis n°90, le CCNE propose une approche internationale des aspects réglementaires. Si certains pays, tels que le Royaume-Uni, acceptent les mères porteuses et le don de gamètes et d’embryons, ils favorisent souvent la levée de l’anonymat dans l’intérêt de l’enfant. Partout, on relève une inquiétude, relative aux conséquences pour l’enfant, de la disponibilité des gamètes. Cette inquiétude  explique que dans de nombreux pays, le don d’ovule et l’accueil d’embryon est interdit comme en Suisse, en Autriche, en Italie, en Norvège, en Allemagne…

 

Anonymat pour prévenir les infanticides 

 

L’accouchement sous X, longtemps exception française d’une législation encadrant la maternité secrète en n’imposant pas aux parents biologiques de déclarer leur identité lors de l’enregistrement du nouveau-né, fait des émules à l’étranger. L’obligation d’indiquer le nom de la mère a entraîné une hausse des abandons sauvages de nouveaux-nés, voire des infanticides et plusieurs pays réfléchissent aujourd’hui à l’anonymat de l’accouchement. L’Allemagne, la Suisse, l’Autriche entre autres, ont mis en place des “Babyklappen”, boîtes à bébés transparentes installées dans les rues. Un lit auto-chauffant permet de recueillir l’enfant et un tampon est à la disposition de la mère pour déposer une empreinte permettant de l’identifier. Dès qu’un enfant est déposé, un signal électronique prévient une équipe qui prendra en charge le nourrisson.

 

Protéger la vie des nourrissons, favoriser le droit à connaître ses origines, encourager la dissociation des filiations en encourageant les dons de gamètes et d’embryons ? La seule question n’est-elle pas comment défendre au mieux l’intérêt de l’enfant ?

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