Autoconservation des ovocytes : assurance maternité ou leurre ?

Publié le 21 Sep, 2018

Quand les médecins vous promettent l’eldorado d’une grossesse possible de plus en plus tard, les avis restent partagés. « Un enfant… si je veux… quand je veux », le célèbre slogan des années 70 retrouve son actualité par le biais d’une technique médicale consistant à prélever des ovocytes d’une femme jeune, à les vitrifier, et à les conserver pendant des années. Ces ovocytes, plus fertiles, seront décongelés le jour où la femme aura recours à une PMA pour avoir un enfant, avec des taux de réussite théoriquement plus élevés.

 

Actuellement autorisée en France pour les seules raisons médicales – cancers dont les traitements risquent d’altérer la fertilité[1]– cette technique est « ouverte à toutes » dans d’autres pays[2].

 

Pour certains c’est une révolution du monde de la procréation et de la liberté reproductive, quand « d’autres y voient un leurre, un traitement incertain, et dénoncent une nouvelle pression sur la maternité ». En 2017, le CCNE s’était montré extrêmement réservé, pointant notamment « le caractère très contraignant de la procédure », « les risques cliniques et médicaux induits » et la possibilité de « pressions sociales et professionnelles émanant de l’entourage ou des employeurs » (cf. : Autoconservation des ovocytes : des réactions très réservées ). « Voulons-nous aller vers un nouveau modèle procréatif ? Si on autorise plus largement cette technique, vous pouvez compter sur les professionnels de la médecine reproductive pour ancrer dans la tête des femmes qu’elles doivent assurer leur fertilité future », s’alarme le Pr Frédérique Kutten, ancien membre du CCNE et co-rapporteur de cet avis.

 

En 2017, l’Académie de Médecine s’était déclarée favorable (cf. L’Académie de médecine favorable à la conservation des ovocytes pour toutes), tout comme le Collège national des gynécologues et obstétriciens français, ou le Pr René Frydman, à l’origine d’Amandine, premier « bébé-éprouvette » français (cf. PMA, GPA, don de gamètes : René Frydman se prononce pour un « grand plan infertilité »). Déjà depuis 2015, cette conservation est proposée à toutes les donneuses d’ovocytes, une véritable brèche dans l’interdiction actuelle (cf. Congélation des ovocytes : des gynécologues contournent la loi ).

 

Ce sujet va  probablement s’imposer comme thème important du débat de révision des lois de bioéthique. Christophe Castaner, délégué général de La République en marche, a proposé la semaine dernière la légalisation de l’« autoconservation pour toutes ». Un nouvel avis du CCNE est attendu mardi qui abordera la question.

 

Voir aussi ::

Ce n’est pas leur carrière qui pousse les femmes à congeler leurs ovocytes

PMA pour toutes, autoconservation des ovocytes, filiation à l’Assemblée nationale : des avis contradictoires

Enquête : une femme sur six regrette d’avoir eu recours à la conservation de ses ovocytes

Autoconservation d’ovocytes : le comité d’éthique suisse partagé

Gel des ovocytes : “Cela crée l’illusion que l’on peut avoir un enfant à n’importe quel âge”

L’autoconservation des ovocytes est « tout sauf une avancée pour les femmes »

Préservation de la fertilité : 17 200 français concernés chaque année

La plupart des femmes qui congèlent leurs ovocytes ne les utilisent jamais

 


[1] En Belgique, l’oncofreezing remboursé et étendu à de nouveaux patients

[2] Congélation des ovocytes en Angleterre : + 460% depuis 2010

 

 

Le Figaro, Agnès Leclair (20/09/2018)

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