Arte : Un documentaire sans nuance sur le RU 486

Publié le 2 Juin, 2015

Arte diffusait hier soir en fin de programme un documentaire sur la pilule abortive, la RU486 sous le titre « L’autre pilule : un combat pour les femmes ».

 

Un documentaire brouillon qui présente dans un premier temps les étapes controversées de la commercialisation de cette pilule par le laboratoire Roussel-Uclaf, et les oppositions suscitées par la mise sur le marché d’une molécule qu’Etienne Baulieu, le médecin et chercheur qui l’a inventée, qualifie de « remarquable ». Pourtant, l’administration du RU486[1] n’est pas dénuée de risques, elle présente des contre indications et des effets indésirables comme le montre une simple recherche sur le Vidal, le dictionnaire de référence des médicaments.

 

Le téléspectateur se trouve en fait devant une large entreprise de promotion qui ne laisse aucune place au doute, qui ostracise, ridiculise et décrédibilise d’une façon systématique tous ceux qui pourraient remettre en question le soit disant progrès suscité par cette pilule, et particulièrement les religions.

 

Le plus étonnant, c’est le peu de femmes qui témoignent et se prononcent en faveur de cette pilule. Seule une allemande, un enfant contre elle dans un porte-bébé, raconte qu’elle a deux enfants : « J’ai choisi ces 2 grossesses en toute conscience ». Elle a avorté deux fois et fait l’éloge de l’avortement médicamenteux : « ça a été mieux, plus simple, comme une perte de sang normale ». Pourtant, une simple recherche sur Internet montre le malaise et le traumatisme de ces femmes qui ont avorté seules et pour qui l’acte aura été beaucoup plus qu’une simple perte de sang normale. Une vidéo est présentée mais arrêtée très vite pour que la femme qui commence à raconter son expérience douloureuse ne puisse pas expliquer les risques réels auxquels elle été confrontée et la souffrance qui ont suivi la prise de médicament. Tout est balayé d’un revers de main.

 

Etienne Baulieu, dans la blouse blanche du médecin, intervient plusieurs fois. Il explique notamment les intérêts économiques de cette méthode, moins couteuse. Mais les femmes qui avortent chez elles sont souvent victimes de complications qui les obligent à se rendre à l’hôpital. Il regrette qu’on parle de pilule abortive et non pas contragestive. Simple question de sémantique ou volonté de faire passer… la pilule ?

 

Il semble qu’on soit dans une énorme machinerie qui vise à faire croire qu’avorter n’est pas une atteinte à la vie, comme l’évoque un des médecins engagé dans un centre d’orthogénie. Et le reportage veut faire peur et semble vouloir stimuler un regain de militantisme féministe : est-ce que les droits des femmes durement acquis par des années de lutte ne seraient pas en train d’être remis en question ? Ne serait-on pas juste à la veille de voir revenir les avortements clandestins ? Pourtant, la machine est bien rodée, le propos bien lisse. Et de fait, ne l’est-elle pas trop pour être vraiment crédible ?

 

Les vrais débats éthiques sont complètement absents. Un passage pose la question du début de la vie humaine : au moment de la fusion entre les deux gamètes ? Quand le fœtus est viable ? A la naissance ? Là encore, le public est noyé.

 

Enfin, le reportage se termine par cette explication malthusienne : « Depuis les années 60, la population mondiale est passé de 3 à 7 milliards. Sans une écologie démographique et une maîtrise de la fécondité, la préservation de l’environnement, les avancées politiques et économiques seront quasi-impossibles ». Ainsi, il faudrait que certains meurent pour que d’autres vivent confortablement, de préférence les mieux portants, et c’est aux femmes que reviendrait le « privilège » de cet arbitrage.

 

[1] Le RU486 ou mifépristone a une action anti progestative, en se liant de façon réversible aux récepteurs à la progestérone au niveau de l’endomètre utérin. Elle suspend ainsi l’action de la progestérone, sans laquelle l’embryon ne peut se développer. Il meurt, et se détache de la paroi utérine : c’est un effet « contragestif ». Elle est associée à des prostaglandines pour une efficacité supérieure.

 

Note Gènéthque

Arte a diffusé le 17 mars dernier un documentaire sur les conséquences de l’IVG (cf. Gènethique vous informe du 18 mars 2015). La chaîne aurait-elle la mémoire courte ?

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