Lors de son dernier voyage en Allemagne, le 22 septembre 2011, le Pape Benoit XVI a souligné, devant le Bundestag, l’existence d’une “écologie de l’homme“, un point “largement négligé” aujourd’hui.
A l’encontre d’une vision utilitariste de la personne humaine, il a rappelé que l’homme “possède une nature qu’il doit respecter et qu’il ne peut manipuler à volonté“. “L’homme ne se crée pas de lui-même. Il est esprit et volonté, mais il est aussi nature, et sa volonté est juste quand il respecte la nature […] quand il s’accepte lui-même pour ce qu’il est, et […] qu’il ne s’est pas créé de soi. C’est […] seulement ainsi que se réalise la véritable liberté humaine“.
Vision utilitariste
Le lendemain, Benoit XVI a fait remarquer, lors d’une célébration œcuménique, combien “l’éthique” est désormais “remplacée par le calcul des conséquences“. En faisant de l’homme une réalité “manipulable“, la vision utilitariste qui prévaut aujourd’hui ne permet pas de préserver la dignité humaine : elle interdit de reconnaître ce qui constitue l’être de l’homme, réduisant ce dernier à des critères questionnables et incertains. Face à ce constat, Benoit XVI a invité son auditoire à travailler pour que la “dignité inviolable de l’homme” soit défendue “de la conception à la mort“, depuis la question du diagnostic préimplantatoire jusqu’à celle de l’euthanasie.
Elimination de l’imparfait
Le néonatologue italien Carlo Bellieni alerte également sur le rejet des enfants atteints de maladies génétiques dans les sociétés occidentales. Le 9 septembre 2011, dans l’éditorial de L’Osservatore Romano intitulé “Elimination de l’imparfait“, il a dénoncé la façon dont ces enfants “sont dépistés de manière systématique avant de naître” et, trop souvent “interdits de naître“. “Ce qui est grave, note Carlo Bellieni, c’est que ce passage au crible et cette sélection ne nous étonnent plus : c’est la norme“. Il cite la situation particulière de la France, rappelant que 96% des fœtus trisomiques dépistés dans le pays sont avortés. Favorisée par l’incapacité de la société à accueillir le différent, la disparition des personnes handicapées dans le panorama social ne peut que renforcer le sentiment de “proscrits génétiques” des familles ayant un enfant malade. Pourtant, si les maladies génétiques sont indésirables, les personnes qui en sont affectées ne doivent pas être considérées comme indésirables. En outre, ajoute Carlo Bellieni, les sommes considérables investies pour empêcher certains enfants de naître permettraient des progrès importants si elles étaient consacrées à la recherche de traitements.
Une réalité éloignée des préjugés
Plusieurs études menées auprès de malades révèlent que lorsque “les conditions extérieures ne leur sont pas négatives, le taux de la qualité de vie de ceux-ci peut s’avérer supérieure à celle de leurs pairs“. Ce constat a été fait pour des adolescents atteints de spina-bifida ou ayant des handicaps physiques importants (Quality of Life Research, 2005, 2006). Or, l’image du handicap que les médias contribuent à forger tend souvent à alimenter une “compassion stérile” qui fausse la réalité, souligne Carlo Bellieni.
Par ailleurs, une récente enquête menée auprès de parents d’enfants trisomiques 21, parue dans l’American Journal of Medical Genetics, dresse un bilan positif : 79% d’entre eux se déclarent heureux de leur choix d’avoir gardé leurs enfants qui sont pour eux “sources de beaucoup d’amour et de fierté“.