Accès à l’IVG : encore et toujours plus loin ?

Publié le 16 Jan, 2025

Quelques jours avant l’anniversaire de la loi Veil (cf. De la loi Veil à l’inscription de l’avortement dans la Constitution ; 50 ans de la loi Veil : l’IVG, un « drame » devenu une « liberté »), le Planning familial a présenté, le 8 janvier, un nouveau plan destiné aux pouvoirs publics visant à « améliorer » l’accès à l’avortement. Il y dresse différentes recommandations.

L’association préconise ainsi de lutter contre la « désinformation » en ligne (cf. Contraception, IVG, genre : un site de Santé Publique France pour informer ou militer ?). Elle souhaite également allonger les délais légaux pour pratiquer un avortement en les faisant passer de 14 à 24 semaines de grossesse (cf. Loi Gaillot : réaction d’un gynécologue). Par ailleurs, le Planning déclare vouloir « simplifier » les démarches administratives et médicales. Il propose notamment d’élargir la compétence en matière d’IVG à d’autres professionnels de santé, comme le personnel infirmier (cf. IVG instrumentales par des sages-femmes : encore une « expérimentation » pérennisée). Enfin, la clause de conscience spécifique à l’avortement, que le Planning familial qualifie de « double », est remise en cause (cf. La clause de conscience : seule rescapée de la « loi Gaillot »). Sarah Durocher, présidente de la confédération nationale du Planning familial, considère en effet que cette clause spécifique « participe à la stigmatisation de cet acte médical ».

Un militantisme sans fin ?

Ces nouvelles recommandations du Planning familial témoignent, une fois de plus, du militantisme effréné des pro-avortements. Où sont les difficultés d’accès quand le nombre d’avortements ne cesse de battre des records alors que les naissances diminuent (cf. Malgré un nombre record d’avortements en 2023, le Sénat s’inquiète d’un accès « fragile ») ? En 2023, pour un avortement, on compte un peu moins de trois naissances (cf. France : 243 623 avortements en 2023, un chiffre encore en hausse).

En outre, un nouveau décret paru en avril 2024 a déjà autorisé les sages-femmes à pratiquer des interruptions volontaires de grossesse instrumentales dans les mêmes conditions que les médecins (cf. IVG : les sages-femmes demandent la réécriture du décret, l’Exécutif obtempère). Le Planning familial ne s’en satisfait pas pour autant.

Des limites « hors sol »

Vouloir allonger les délais légaux à 24 semaines de grossesse apparait également largement contestable. En Angleterre, où ce délai est en vigueur, des médecins ont d’ailleurs demandé au gouvernement de faire machine arrière afin de réduire les délais « compte tenu des progrès de la médecine qui ont conduit à une amélioration significative des taux de survie pour les bébés nés avant la délai autorisé pour avorter de 24 semaines » (cf. Avortement : 700 médecins anglais demandent une réduction des délais de 24 à 22 semaines).

De plus en plus de bébés nés à 22 ou 23 semaines survivent et sont en bonne santé (cf. Prématurité : les limites de la viabilité repoussées). Vouloir allonger les délais légaux ne peut qu’interpeller. Comment, au même stade de la grossesse, pourrait-on, dans un même service, se battre pour sauver un bébé et le maintenir en vie, et, au contraire, vouloir mettre fin à la vie d’un autre ? (cf. Des jumeaux prématurés battent un record de survie)

En outre, comment imaginer vouloir aller jusqu’à 24 semaines de grossesse alors que de nombreux soignants ne voulaient déjà pas des délais actuels issus de la loi Gaillot, et que des problèmes liés à ce récent changement subsistent ? (cf. IVG entre 14 et 16 SA : une pratique qui continue de poser question)

Une interprétation erronée

Le Planning familial tente enfin de restreindre une fois encore la liberté de conscience (cf. IVG dans la Constitution : la « liberté » des femmes au détriment de la liberté de conscience ?). Ce n’est pas une nouveauté, mais l’association opère une erreur en reléguant la clause de conscience spécifique à l’IVG, issue de l’article L 2212-8 du Code de la santé publique (CSP), à une simple redite de la clause générale prévue dans ce même code (article R 4127-47 du CSP).

Les deux clauses n’ont en effet pas la même valeur juridique. L’une a été prévue par la loi Veil et est donc dotée d’une valeur législative, tandis que l’autre n’a qu’une valeur réglementaire. Les deux articles couvrent en outre des champs différents. En effet, la clause de conscience spécifique pose un principe absolu, là où la clause générale prévoit une exception, puisqu’elle ne peut pas être invoquée en cas d’urgence, où lorsque le médecin « manquerait à ses devoirs d’humanité ». En outre, les deux articles bénéficient à des personnes différentes. La clause de conscience spécifique s’applique à l’ensemble du personnel hospitalier, ce qui n’est pas le cas de la clause générale qui ne concerne que les médecins, les sages-femmes et les infirmiers (cf. La clause de conscience : seule rescapée de la « loi Gaillot »).

Autant d’éléments qui démontrent à nouveau l’acharnement du Planning familial à repousser toujours plus loin les limites (cf. « Fest’IVG » : un évènement pour financer les IVG hors délai). Est-ce vraiment servir les femmes et leur santé ?

Photo : iStock

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